CULTURE A CHLEF - EL ASNAM -

CULTURE A CHLEF - EL ASNAM -

LES JEUX TRADITIONNELS EN ALGERIE

                             CAFE LITTERAIRE DU 8 AVRIL 2014

Depuis l’interdiction de tenir le café littéraire durant la campagne de vote en vue des présidentielles, nous avons tenu à ce que le café littéraire puisse se tenir sans discontinuer et nous remercions M. Attaf Mohamed, président de l’A.R.A.D, de nous avoir permis pendant ces trois dernières semaines de pouvoir tenir notre café littéraire au sein du bureau de l’association des résistants et ayants-droits de la wilaya de Chlef. Comme à l’accoutumée, en remplacement de M. Kassoul Mohamed qui devait donner une conférence, M. le président du café littéraire l’a suppléé et a tenu une conférence sous le thème de : « Les jeux traditionnels en Algérie ». Il fit un bref historique sur les jeux traditionnels depuis l’antiquité en insistant sur le fait que tous les jeux, ou presque se ressemblent à travers le monde avec quelques variantes. En matière de définition, nous pouvons dire que les jeux traditions sont des activités ludiques ayant marqué une époque ou une région bien précise. La richesse de ce patrimoine n’est plus à démontrer. Il serait souhaitable que nous puissions le transmettre aux générations montantes avant de le perdre, peut-être, à jamais. La réflexion, l’éducation, la sociabilité de tout un chacun sont les constantes des jeux traditionnels qui permettent de saisir les contours de la vie d’une société donnée, à une époque donnée. Les jeux traditionnels cultivent chez l’être humain, la réflexion, l’adresse, la précision dans la pensée ainsi que la précision dans le geste et la parole. C’est une éducation complémentaire que l’on peut donner à l’enfant. Ne dit-on pas que « le jeu est le propre de l’enfant ». Un enfant qui ne joue pas est un enfant malade, soit physiquement ou mentalement. Nous pouvons dire que les jeux traditionnels remontent à plus de 2.000 ans et même plus dans le temps. Les jeux traditionnels ont été, depuis tous les temps, l’apanage des sociétés, surtout primaires. Nous distinguons généralement trois sortes de jeux traditionnels : Les jeux de réflexion, les jeux d’adresse, les jeux éducatifs.

1/- el khoumes (5 petites pierres) : Déposer les 5 pierres devant soi par terre, puis prendre la première pierre, la lancer en l’air et prendre par terre une deuxième pierre avec laquelle il faut capter la deuxième qu’on a lancé en l’air et ainsi de suite jusqu’à la cinquième pierre.

2/- le jeu de billes : Il se joue presque comme le jeu de boules avec une variante propre. Déposer une bille loin des joueurs  puis chaque joueur doit la tirer, s’il la touche il la gagne et ce sera au tour du deuxième joueur de déposer une bille et ainsi de suite.

3/- el ôuichra :(10 petites pierres) : C’est une variante d’el khoumes. On dépose les dix pierres devant le joueur. Il doit prendre les pierres une par une, en lançant une pierre dans l’air, puis 2 par 2, puis 3 par 3, puis 4 par 4, puisse 5 par 5. Le joueur qui aura réussi aura gagné la partie. Le gage de celui qui perd est de recevoir des tapes sur les cuisses pour chaque pierre gagné par son adversaire.

4/- el gsab : (lamelles de roseau) : On prend un bout de roseau d’une dizaine de centimètres et on le coupe en 4, et on prend un autre roseau de la même longueur et on le coupe de même en 4 pour avoir 5 lames de roseau identiques. Le jeu se joue à plusieurs joueurs. Le joueur doit lancer les lames de roseaux en l’air et les réceptionner avec le dos de la main, puis il doit les étaler par terre entièrement sur le dos. S’il réussit, il gagne la première manche, et il continue. S’il perd, c’est au joueur suivant de tenter de déclasser son  prédécesseur et ainsi de suite pour tous les joueurs suivants. Le jeu peut se faire à 2 ou plusieurs.

5/- la marine (La marelle) (L’avion) : Il faut tracer un sorte d’avion à la craie sur le sol : 3 carrés identiques dans le prolongement l’un de l’autre, puis à la quatrième place, tracer 3 carrés perpendiculaires aux premiers carrés, pour terminer, tracer un septième carré dans le prolongement des 3 carrés perpendiculaires. Ensuite, chaque joueuse doit marcher sur un seul pied en sautillant et en poussant une pierre avec son pied pour la déplacer d’un carreau à un autre. Arrivé au quatrième carreau, la joueuse doit pousser la pierre carrée sur le quatrième carreau et sauter pieds écartés sur le cinquième et sixième carreau, puis revient sur un pied sur le quatrième carreau et pousse la pierre carrée sur le septième carreau. Après cela elle doit refaire le trajet inverse jusqu’à sortir de la marine.

6/- eddiar :(8 trous dans le sol) : Il faut creuser huit trous dans le sol et les remplir d’excréments de moutons ou chèvres. Il faut répartir les excréments secs dans tous les trous à raison de quatre ou cinq. Commencer par prendre le nombre se trouvant dans le premier trou et le distribuer sur tous les autres. Il faut Eviter de laisser un nombre impair dans les trous, sinon on perd la partie et c’est au joueur suivant de tenter sa chance.

7/- ezzarbout : (la toupie) : Ca se joue seul, mais on peut en créer une variante en essayant de pousser une pièce de monnaie déposée dans une cercle, si on la fait sortir, elle nous appartient. Cela peut se jouer à plusieurs.

8/enneguiza :(gymnastique) (sautillement) : Il s’agit de nouer un élastique ou une corde ou bien un fil et deux joueuses doivent faire les poteaux. Les joueuses doivent alors sauter, une à une les deux lignes du fil tirées par les deux joueuses servant de poteaux et ainsi de suite. Les joueuses doivent se faire remplacer au fur et à mesure que d’autres joueuses échouent dans leur tentative de saut.

9/-el corda : (la corde) : Deux joueuses doivent faire tournoyer une corde entre elles à bout de bras, et une troisième joueuse doit sauter pieds joints en évitant d’accrocher la corde, en chantant et en comptant les tours de corde et ainsi de suite, pour toutes les joueuses qui suivront. Celle qui aura tenu le plus longtemps sera sacrée gagnante de la partie.

10/- erritcha ou el mitcha : (La limite) : C’est deux variantes. Pour la première, on doit tracer une ligne avec la pointe d’un couteau et on doit lancer le couteau à partir d’une autre ligne sur laquelle se mettront les joueurs. Celui qui pointera son couteau le plus près possible de la ligne aura gagné la partie. Cela se fait avec des paris, bien sûr. Pour la deuxième, on trace des lignes de jeux comme pour la première, mais dans ce cas, on joue avec des pièces de monnaies, par exemple un dinar, celui qui placera sa pièce le plus près possible de la ligne, récoltera toutes les autres pièces des autres joueurs.

11/- la délivrance : Cela se joue à plusieurs en 2 équipes. Les uns seront les gardiens et les autres seront les amis qui doivent délivrer leur copain de la prison.

12/- el gaboudh : (attrapes-moi si tu peux) : Certains l’appellent « trape-trape ». Il y a plusieurs joueurs qui doivent s’esquiver et éviter de se faire attraper par un joueur poursuivant, si ce dernier touche l’un d’eux, il prend sa place et ce sera à l’autre de faire le chasseur jusqu’à ce qu’il touche un autre joueur pour reprendre son état de « chassé ».

13/- boucha’âra : (la chasse aux chauves-souris) : Certains l’appellent « Bou Ba’âra ». Sur un roseau assez long, on attache une branche sèche de jujubier et au clair de lune, on essaie d’attraper les chauves-souris, le soir à la tombée de la nuit.

14/- el hedjayates : (les devinettes) : Cela se joue le soir et généralement, c’est dévolu aux filles et aux femmes dans les soirées d’hiver. On pose à tour de rôle des devinettes pour tester l’intelligence de toutes les femmes et jeunes filles présentes. (On dit d’ailleurs que celui qui dira les devinettes durant la journée deviendra teigneux)

15/- el boukalates : (les devises) : C’est un jeu pour jeunes filles et cela se joue généralement dans les soirées ramadhanesques. Les jeunes filles devisent pour essayer de comprendre leur avenir, elles doivent faire un vœu avant qu’une conteuse n’eut dit un quatrain poétique appelé devise en nouant leur mouchoir.

16/- el gate chrab el hlib : (le chat a bu le lait) : Je ne me rappelle pas très bien de ce jeu, car nous le jouions étant très jeune. Je pense que le plus jeune ou la plus jeune d’entre nous devait faire le chat et miauler pendant que les autres doivent répéter « maman, le chat a bu le lait »,

17/- el aâcha : (la dinette) : Les jeunes filles et les jeunes enfants jouent aux parents et essayent même de préparer fictivement parfois les repas. Ils miment généralement leurs parents dans leurs actes familiaux et sociaux.

18/- el blouta (la pelote fumée) : Il s’agit de confectionner une pelote avec des chiffons usagés. Le joueur qui doit commencer doit poursuivre tous les autres joueurs pour essayer d’en toucher un pour pouvoir prendre sa place en tant chassé et c’est à celui qui a été touché de faire le chasseur et ainsi de suite.

19/- el khazoune : (ca y est) : C’est un jeu qui demande à un joueur de fermer les yeux en laissant le temps à ses camarades de pouvoir se cacher en disant plusieurs fois « ça y est » et si on lui répond « ça y est » alors il ouvre les yeux et commence à rechercher ses camarades. Le premier qu’il trouve le remplacera pour fermer les yeux et recherchera ses camarades et ainsi de suite.

20/- ennoyou : (les noyaux d’abricots) : C’est durant la période des abricots, quand nous les mangeons, nous en gardons les noyaux que nous ferons sécher. Ils nous serviront pour notre jeu. Tous les enfants ont un sac en toile de petit format que leur maman leur aurait cousu de prime abord et chacun des enfants arborera son sac plein et se vantera d’avoir le plus grand nombre de noyaux. Le jeu consiste à placer en pyramide 4 noyaux que les autres joueurs tireront. Celui à qui appartient la pyramide ramassera tous les noyaux qui n’ont pas fait tomber sa pyramide et celui qui touchera la pyramide prendra seulement les 4 noyaux de celle-ci plus le noyau de tir.

21/- kourate el mas’yed : (la balle avec la batte (mas’yed) : Confectionner la pelote avec de vieux chiffons. Cela se joue en équipe de 3 à 5 joueurs. Chaque joueur aura au préalable un bâton « Mas’yed » (arme de chasse) qui est un bâton simple avec un bout recourbé (comme une sorte de boomerang). Les joueurs de chaque équipe doivent atteindre les buts de l’adversaire en poussant la pelote à l’aide de leur bâton en évitant de toucher l’adversaire. Ceux qui auront marqué le plus de buts auront gagné. Généralement, cela se termine par des blessés. Dans certaines régions, ce sport est utilisé pour prier Dieu de leur donner la pluie.

22/- el ma’âfra : (la lutte libre) : Elle est pratiquée en été, après les moissons, lorsqu’on aura rentré le grain. Les jeunes gens et les moins jeunes essaient de tester leur force sur la place où on a battu le blé (Ennader).

23/- gleb khobza gleb tadjine : (portes-moi et je te porte) : 2 joueurs se mettent dos-à-dos et croisent leurs bras. Ils doivent se porter tour à tour en essayant de plier le plus bas possible sans faire tomber le deuxième joueur. Ce jeu est un sport qui permet de faire travailler les muscles dorsaux.

24/-  cheltek : (devines  ce que j’ai dans la main) : C’est un mot qui veut dire « devines ». Le jeu consiste à mettre les mains derrière son dos et en mettant dans l’une d’elles une date ou un bonbon, puis le présenter au joueur en disant « cheltek ». Le joueur doit trouver dans quelle main se trouve la datte ou le bonbon, s’il le trouve, il les gagne et ainsi de suite pour les joueurs suivants.

26/- essaffara : (le sifflet) : Le noyau d’abricot ne nous sert pas seulement pour jouer au tir à la pyramide mais encore au sifflet. En effet, on prend un noyau et on commence à le frotter vigoureusement sur une pierre jusqu’à ce qu’il chauffe bien et commence à s’aplatir sur le côté. Il faut continuer jusqu'à ce qu’apparaisse un trou. Il faut alors vider le noyau et on peut siffler dedans. Cela donne un son assez strident.

27/- ezzelidja : (la glisse ou ski) : Feuille d’aloès « soubar » à qui nous enlevons les épines. Soit que l’on s’assied dessus pour en faire une sorte de luge, soit on attache deux feuilles aux pieds et nous en faisons une paire de ski.

En dernier ressort, le conférencier insista  sur le fait qu’il faut transcrire tous ces jeux, qui font partie de notre patrimoine culturel immatériel afin de les préserver car toute culture orale aurait tendance à se volatiliser et à s’estomper dans le temps. Il lancera un appel pressant aux chercheurs universitaires pour se pencher sur le sujet afin de l’arracher à l’oubli.

                                                                    Mohamed Boudia



15/04/2014
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