CULTURE A CHLEF - EL ASNAM -

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LA BRÛLURE - Les enfumades de la Dahra - Par Abdelkader Guerine

LA BRÛLURE - Les Enfumades de la Dahra - Par Abdelkader Guerine

 

 

 

Abdelkader Guerine, très grand poète d'expression française, peu connu par les tenants de la culture, vient d'éditer à titre d'auteur chez une maison d'édition à Oran "Dar-El Adib" son huitième recueil romancé qui allie la poésie à la prose pour raconter une page oubliée de l'histoire d'une certaine contrée dans la wilaya de Chlef, dans la commune de Dahra, Daîra de Taougrite, où se sont passés des génocides de la part des colonels et généraux de l'armée française d'Afrique et qu'on nomme communément "Les enfumades du Dahra" à Ouled Riah.

 

Fervent adepte du "Café Littéraire" dirigée par Mohamed Boudia, écrivain et journaliste indépendant et membre actif de ce dernier, Monsieur Guerine Abdelkader nous a présenté son dernier-né dont le titre est "La Brûlure - Les enfumades de la Dahra" C'est un roman qui allie la poésie à la prose et en fait un roman pour raconter par le biais d'un "Goual" ou troubadour, allant de hameau en hameau, de souk en souk porter les bonnes et les mauvaises nouvelles. C'est le moyen de transmission orale de la vie socio-culturelle des habitants de l'Afrique du Nord et en particulier de l'Algérie. Ce troubadour, faisant parfois des rêves prémonitoires dépêche sa personne chez les Ouled Riah pour leur porter la mauvaise nouvelle représentée par l'invasion de leur pays et localité par la soldatesque française, un certain 5 juillet 1830. Ayant rassemblé autour de lui les Ouled Riah, il leur conte ses rêves et ses appréhensions concernant leur devenir et leur existence menacée par cette intrusion.

 

Laissons Monsieur Abdelkader Guerine nous dire et nous présenter son roman historique et poétique en même temps :

 

Dans la préface, l'auteur nous donne une idée du rôle du poète ou goual comme suit :

" Le poète savait que cette exaction inhumaine, comme beaucoup d'autres d'ailleurs, allait être dépassée et oubliée. Les Français n'avaient jamais installé de bureau d'administration à Ouled Riah, c'était une localité à laquelle ils n'avaient pas changé de nom, c'était un lieu qu'il fallait nier, une page de non histoire qu'il fallait déchirer........" (Dixit : Abdelkader Guerine)

" De l'histoire, des lettres et plein de poésie. Abdelkader Guérine, auteur de sept autres ouvrages (recueils de poésie) raconte dans ce livre le parcours d'un "goual" ou troubadour, un orateur qui passe de médersa en zaouïa et termine son éternelle errance dans les souks hebdomadaires de la région de la Dahra. Les nouvelles qu'il rapporte à la population des paysans ne sont pas toujours bonnes. C'est un véritable drame qu'il annonce pour cette fois, plus de mille âmes allaient être enfumées  dans les grottes situées dans ces hauteurs désolées et accidentées, après un combat féroce  contre un ennemi plus fort et lourdement armé, c'était le 18 Juin 1845.

l'auteur joint le dialogue poétique aux récits prosaïques pour raconter un drame tragique que l'histoire n'a jamais noté, avec des narrations fictives et des descriptions proches de l'atmosphère réelle, une image du climat socioculturel de la région  de Chlef à cette époque-là ".

 

Monsieur Abdelkader Guerine a bien inisisté sur le fait qu'il n'était pas un chercheur en histoire et encore moins un historien. Il a seulement voulu donner une certaine nuance poétique à son roman en introduisant un poète (Goual) ou (troubadour) pour agrémenter la trame de son roman qui se veut un témoignage poignant de cette page inoubliable de notre histoire.

 

Je vous donne ici, quelques passages du livre :

" Ce ne sont pas les vrais "spagnoul"

   Qui ont chassé le grand sultan

   Qui prit la mer pour Istanbul

   Cédant le bled à un satan

Répondit le poète avec un air inquiet, déssiné sur son visage rond aux yeux qui semblaient savants d'un malheur qui allait s'abattre sur tout le Tell ".

 

" Que veulent-ils chez nous ? Que vont-ils faire de nous ? se demandèrent bruyamment et nerveusement les uns et les autres..." 

" Ils veulent poser des lois roumi

   Auxquelles l'arabe est bien soumis,

   Ils sont en route et seront là

   Pour faire l'enfer de l'au-de-là

   Ils veulent la terre et le bétail

   Et toi l'esclave qui obéit,

   Les bêtes qu'ils veulent et la volaille

   Et toi, étranger dans ton pays."

 

En conclusion, l'auteur nous décrit la fin de ce macabre épisode qui a vu des centaines de personnes, tous sexes et âges confondus, mourir d'une fin atroce que leur réserva un futur général de France.

 

" Il prit son âne et continua son chemin, de zaouïa en souk, récitant dans son passage, l'injuste destin des tribus de la Dahra, espérant trouver l'oreille attentive qui puisse décorer les mots  de leurs raisons meilleures ...... "

" Nous étions mille et une personnes

  Avides de paix jusqu'à l'aumône,

  Coincées dedans les vieilles grottes,

  Cernées d'une force qui porte des bottes,

  Les passants fondent l'avenir sur un socle de paroles vaporeuses, la ville vieillit et laisse l'oubli gagner du territoire précieux, le droit vous parle :

" Peuple vainqueur et souverain,

  Pris dans la houle des vents marins,

  Salue les hommes qui ont donné

  Leurs vies pour que tu sois trôné,

  Peuple garant d'un fier podium

  Pris dans le piège d'un rêve d'opium

  Décompte les boules du chapelet

  Au nombre de morts qui t'appelaient

  Peuple fidèle aux justes causes

  Pris dans les mailles d'un filet rose,

  Déterre le livre de ton histoire

  Pour que l'étoile éclaire le noir,

  Les passants reculent vers le néant pour s'élancer dans un ciel fantôme,

  La ville tremble quand la voix des miraculés exulte des échos d'émoi, "

 

Le poète se recueille;

 

" Nous étions mille et un cadavres,

  Virés du temps d'une vie macabre,

  Brûlés vivants d'un feu banal

  A l'ordre bref du général. "

 

Dit le poète dans toutes ses "gaada" partout il était passé après."

                             (Dixit : Abdelkader Guerine)

 

En ultime conclusion, l'auteur nous informe de la page historique concernant les enfumades de la Dahra :

 

"Ghar El Frachiche", était le nom que la population donnait à cette grotte profonde, c'est là où le sinistre Pélissier avait accompli son crime odieux en enfumant plus de mille paysans dans le massif de la Dahra, hommes, femmes, enfants et vieilles personnes. Ce crime n'a jamais été ni jugé ni puni, il n'a été écrit dans aucun livre d'histoire."""

 

L'émotion était au comble dans la salle et les débats furent assez chauds et les membres du café littéraire se sont attelés à critiquer positivement l'oeuvre de leur collègue et ami Abdelkader Guerine.

 

Comme de coutume, Monsieur Boudia Mohamed, donna la parole aux poètes présents pour déclamer quelques-unes de leur poésie. C'est Mme Saï Aouda qui fut la première à entamer un poème "Chi'ir El malhoun" décrivant un individu opportuniste qui s'accapare la culture sans en être imprégné pour ses besoins matériels propres. Ce fut ensuite le tour de Monsieur Boutoubat Mohamed, poète engagé, de déclamer un de ses poèmes concernant la vague de démocratie et de soulèvement au sein des pays arabes pour clore son poème par une tirade en faveur de Ghaza et de la Palestine.

 

Lien/: "LA BRÛLURE - Les enfumades de la Dahra" par Abdelkader Guerine - Editions Dar-El-Adib - Oran - ISBN 978-9947-856-61-1

Dépôt légal : 1058-2011

 

   Mohamed Boudia - Ecrivain et journaliste indépendant -

 



17/03/2011
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