- Un jour, un pauvre et vieil enseignant Sentant venir son renvoi imminent, Fit venir ses enfants dès le matin Et leur parla sans témoins. - Gardez-vous, leur dit-il De faire un métier inutile, C'est-à-dire éduquer et enseigner, Plutôt vendre croissants et beignets. - Trouvez-vous de bons jobs, Faites-vous élire et devenez snobs, Construisez des routes, des ponts ou des autoroutes, Mais gagnez de l’argent coûte que coûte. - Devenez importateurs, opérateurs ou footballeurs, Sénateurs ou à l’occasion, rapporteurs, Mais éloignez-vous de l’école ! Ce n’est pas là que vous aurez le beau rôle. - Pendant trois décennies, j’ai trimé, sué et bavé J’ai été écarté, dédaigné, sous-estimé et menacé, Par de jeunes arrivistes et des médiocres Qui sentaient encore le papier et l’encre, - Mais comme le vieux roseau, je n’ai jamais plié, Et au camp des jaunes je ne me suis jamais rallié. - Adieu père et professeur, Reprirent ses enfants en chœur, Quand demain les détenteurs Auront décidé de ton heure, - Quand la sentence sera prononcée, Et que le couperet injuste sur ta tête sera lâché L’école, dont tu as été le modèle et le pilier Ne sera plus qu’un vestige du passé. Mme B. L., Khenchela
Source "Le soir d'Algérie" (vox populi) 9/3/2010 |